Titre : Arthur Rimbaud, le voleur de feu
Auteur : Sarah Cohen-Scali
Edition : Le livre de poches
Nombre de pages : 248
Genre : Jeunesse/Biographique
Prix : 5,90€
Prix : 5,90€
Quatrième: Arthur déteste Charville, cette ville de province grise et triste où il est né un jour de 1854, et où il vit avec sa mère et ses deux sœurs. Alors, pour tromper la monotonie des jours, Arthur dévore livre après livre. Et puis il rêve d'un oiseau multicolore, bleu, vert, rouge, qu'il nomme Baou et qui lui inspire des poèmes. Car Arthur se fiche d'être un élève modèle. Il veut être poète, même si c'est être voyou...
Encore une chronique
écrite en cours d’histoire. Que voulez-vous, la dissidence peut arriver n’importe
quand ! Je vais vous parler d’un livre cher à mon cœur, qui m’a plus
touchée que n’importe quel livre. Je ne le pensais pas, que j’avais un alter
ego il y a 150 ans. Un livre qui m’a été conseillé par une amie et qui m’a
bouleversée.
Avant de commencer, je veux déjà
faire une petite mise au point. Comme tout le monde j’ai un passé, des
souffrances, des joies. J’ai eu un père très dur, souvent cruel, qui a fait de
moi une personne complexe, tourmentée qui prends parfois des décisions
incohérentes, et avec une âme profondément compliquée. J’ai forgé mes propres
idées, et je suis une écorché-vive, comme notre cher poète. Ce roman a su me
toucher plus que n’importe lequel. Et vous allez comprendre pourquoi. On
suit donc Arthur, depuis son plus jeune âge, dans cette vie des Ardennes (ma
région, coïncidence ?), où il est profondément malheureux. Avec une mère
archaïque, un père absent, et un lieu de vie médiocre, Arthur rêve d’aventures,
mais ce qu’il veut plus que tout, c’est devenir poète. Sa mère, qui le voit plutôt
exercer un métier sérieux et refuse catégoriquement de le laisser vivre sa
passion. Fugue après fugue, sur le fond d’une guerre sanglante, on découvre un Arthur
torturé, qui a été brisé par la vie bien trop jeune. Arthur Rimbaud a donc
beaucoup souffert, ce qui le rends très attachant. Et, forcément, je me suis identifiée
à lui : j’ai reconnu ma
souffrance dans la sienne. Avoir un parent despote, c’est très
difficile, et ça m’a brisé le cœur bien des fois, face à la dureté sans nom de
sa mère. On a un protagoniste qui se bat pour ce qu’il veut être, qui ne laisse
pas tomber. J’ai trouvé que la
fugue est une véritable question élevée et que c’est très intéressant
de s’interroger sur les motivations, si elles ont lieu d’être ou non, si ce n’est
question que de crise d’adolescence où que cela cache quelque chose de bien
plus profond ? Et l’état psychologique du fugueur, complètement paumé, ne
sachant pas où aller, mais en même temps savourant le doux goût de la liberté.
Egalement, les conditions de vie, d’un adolescent livré à lui-même dans la
compagne profonde Ardennaise, avec tous les dangers. On voit également les
limites de la fugue, quand elle s’arrête, quand on retourne chez soi, submergé
par la honte et la peur. Et voir nos rêves fracassés à jamais…
A travers Arthur, j’ai vu le message
du roman : se battre, se battre
comme un acharné pour nos rêves. Si Arthur ne s’était pas
rebellé, on aurait pas eu la chance de lire ses fabuleux poètes, qui montre
bien son talent indescriptible. Eh bien,
je suivrais ce joli conseil : je me battrais pour aller au bout de mes
rêves. Bref, parlons de la relation entre les personnages. Je trouve que l’auteur
a fait un étonnant travail, bien approfondi, sur les liens de cette famille. On
a déjà Frédérique, l’aîné, aussi malheureux que son frère. Je ne me suis pas
vraiment attachée à lui, on ne le voit pas beaucoup, mais c’est quelqu’un qui a
beaucoup souffert. Et puis Vitalie !! Mon personnage préféré après Arthur.
J’ai adoré sa sensibilité, sa lucidité et le lien qui la relie à son frère. Ces
deux-là sont les plus proches, et voir une si belle relation frère-sœur, ça
fait chaud au cœur. J’ai tant aimé
Vitalie pour son courage, son amour et sa force. Isabelle, la
cadette, n’est pas forcément très intéressante. La mère, par contre, est
un personnage haut en couleur. On ne voit que son despotisme et sa sévérité
à toute épreuve, mais on en vient presque à être pris d’empathie pour elle :
elle a eu un passé difficile, et si ça n’excuse pas son comportement, ça l’explique.
Et puis, est-ce que les poèmes de
Rimbaud auraient été aussi bon si elle n’avait pas été source de son malheur ? J’en doute fort. Après
tout, les plus grands écrivains sont les plus torturés. Mais ce qui est m’a
touchée dans ce personnage, c’est le réalisme hors-pair, avec quelques
rares scènes qui nous prouvent que c’est un être humain, qu’elle aime ses
enfants, et qu’elle peut être sensible. Oui oui.
Sinon, j’ai retrouvé mon petit réalisme
zolien. Mais en plus accessible on va dire. Je me suis retrouvée plongée à
la fin du XIXème siècle et ça m’a énormément plu ! J’ai notamment une
scène de la ville envahie par les soldats prusses qui était délicieuse à lire,
avec cette description, et ces jolies figures de style ! Dans ce roman, on
a donc une bonne dose d’histoire,
ce qui m’a vraiment passionnée ! Et, encore une fois, ça passe tout seul !
On comprend donc mieux le contexte, et on se rends compte de la difficulté de
vie à cette époque, notamment à cause de la guerre. J’ai donc appris beaucoup
de choses, en effet, l’auteur va dans tous les domaines. Que ce soit la vie
rurale ou urbaine, l’éducation très sévère à l’époque, le regard des autres
quand on est une femme seule avec des enfants, les ragots, les idées affolantes
des profs, la violence entre les enfants qui se perpétuent malheureusement, la
question du bonheur à l’époque, la place de la femme dans la société… On en
a donc pour tous les goûts et au-delà de la biographie de Rimbaud, c’est une
véritable mine d’or pour la vie à cette époque, même si ce n’est pas encore
très bien approfondi. C’est ce que j’adore chez Cohen-Scali, cette capacité à emmagasiner le
plus de choses en le rendant passionnant ! Comme dans Max,
un roman que j’avais plus qu’adoré ! Encore une fois, j’ai adoré la plume
de l’auteur, qui a une saveur bien particulière, qui est très riche et pourtant
très fluide. C’est un livre addictif, rempli d’action, qui nous fait
réfléchir sur beaucoup de choses. On est bien loin des biographies chiantes
et redondantes ! De plus, on a de nombreuses références à ses poèmes
dont Roman, mon préféré de ce poète.
Pour
conclure, ce roman est un coup de cœur. Je ne suis absolument pas déçue par l’auteur
que j’adule et qui a eu me tenir en haleine tout au long de ma lecture. C’est
un roman très complet, très touchant et très réaliste. J’ai su m’identifier
avec profondeur à Arthur, le poète écorché vif. J’ai apprécié aussi les
questionnements que peuvent susciter une telle société. Un roman simple en
somme, mais que l’auteur a su sublimer pour en faire un énième chef d’œuvre.
Ma note: 20/20