dimanche 7 septembre 2014

Les écrits d'Emilie {1} J'espère.

J’espère.

  — Ça va ?
  Si je réponds « non », elle va me poser des questions, et ça ne finira jamais. Si je réponds « oui », ce sera un mensonge. Alors je me tais, en espérant qu’elle va se lasser et me laisser tranquille.
  J’attends ça depuis des jours et des semaines.
  Je déteste cette fille. Depuis la sixième, elle se moque de moi, avec les autres abrutis qui lui servent d’amis. Elle me demande toujours comment je vais alors qu’elle se fiche de ma réponse. Le prof arrive et nous commençons à monter les escaliers. J’espère qu’elle ne me suivra pas. J’espère qu’elle va laisser tomber pour aujourd’hui.
  Raté. Par un heureux hasard, son prof vient en même temps que le mien, et les deux classes montent en même temps. Elle se met à ma hauteur et insiste :
  — Ça va ?
  — Fiche-moi la paix.
  J’accélère, mais elle continue de me suivre.
  — Pourquoi tu ne me réponds pas ?
  Je ne dis rien. La réponse à sa question est évidente : je ne veux pas lui parler. Elle n’a pas l’air de le comprendre, car elle insiste :
  — Hé ! Pourquoi tu ne me réponds pas ?
  Deuxième étage. Elle ne va pas dans le même couloir que moi, je vais enfin pouvoir m’éloigner d’elle. Pourtant, elle me suit encore et, d’un coup, saisit mon bras et me plaque avec facilité contre le mur. Je n’ai aucune liberté de mouvement, mon corset m’entrave. Elle me serre le bras jusqu’à me faire mal. Je vais avoir une marque.
  — Alors ? Ça va ?
  Elle sourit. Devant nous, les autres élèves passent. Certains rient, d’autres détournent les yeux. Il n’y a aucun prof. Et, de toute façon, qui voudrait me défendre ? Les personnes qui m’apprécient se comptent sur les doigts de la main. 
  — Dégage.
  — Réponds-moi.
  — Dégage !
  Je la repousse du mieux que je peux. Je ne veux pas qu’elle me touche, je veux qu’elle s’éloigne de moi et qu’elle rejoigne sa putain de classe et ses amis débiles. Elle a l’air surprise, et c’est une petite victoire pour moi : cette fois, je ne vais pas me laisser faire. Je me décale sur le côté puis lui lance un regard assassin. Elle peut aller se faire voir, avec ses questions idiotes, sa façon de me bousculer, ses piques et son air dégagé. Elle ose dire que nous sommes amies alors qu’elle ne sait pas qui je suis et qu’elle passe son temps à me harceler, avec sa petite cour. 
  Puis je me tourne et rejoins ma classe. Le prof vient d’arriver ; je me demande s’il a vu ce qu’il s’était passé. Peut-être pas : il discutait avec un collègue. Dans le rang, personne ne me remarque. Je suis redevenue invisible.
  Il est à peine huit heures du matin et j’aimerais déjà être à la fin de la journée.

#Autobiographique

1 commentaire:

  1. Un mardi matin d'avril... Texte écrit 5 mois plus tard, alors que je m'ennuyais. ^^
    Emilie

    RépondreSupprimer

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...